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RENCONTRE AVEC LÉA COLLOBER, TRANSMETTRE L'AMOUR DU VIVANT
Réalisatrice, naturaliste et photographe passionnée, Léa Collober communique son enthousiasme pour la faune et la flore au plus grand nombre... Un grand nombre de bientôt 25 000 personnes engagées qui la suivent sur Instagram avec sa page Enjoy Nature With Me. C'est un savant mélange d'images émerveillantes et d'informations scientifiques vulgarisées pour prendre la mesure de ce qui nous entoure et qu'il est grand temps de protéger.
Entre projections, expositions, conférences et animations, Léa Collober déploie sa passion pour le monde animal et la répand comme une toile d'araignée bien tissée. L'idée est simple, mais le défi est de taille : nous faire entrer dans d'autres dimensions, souvent plus petites, méconnues, et pourtant bien réelles et si proches. À l'instar de son dernier projet de film sur les mares, Odyssée Mare, l'artiste nous offre à découvrir "des mondes dans des mondes" dignes des plus grandes sciences fictions. Bon voyage !
ENCHANTÉ.E !
LÉA COLLOBER © VALENTIN TRUCCHI
Je suis réalisatrice, naturaliste et photographe. Je crée des documentaires et des vidéos de vulgarisation scientifique sur la faune française avec une spécialisation pour la macro et le micro, mais je m’intéresse aussi à l'ornithologie et aux mammifères.
Je combine plusieurs contrats à côté de mes projets de films et j’aide aussi ceux des autres, ça me laisse un emploi du temps assez flexible. Je travaille pour la communication de deux réserves en France. Il y a la Réserve Naturelle Régionale du Bocage des Antonins à Saint-Marc-La-Lande, où chaque année je réalise une nouvelle vidéo, sur le bocage, les haies, l’histoire de la réserve… Je travaille aussi pour la Réserve Naturelle de l'Étang de Cousseau en Gironde, où la communication est plus tournée vers les programmes de réintroductions comme le bousier, et puis cette année sur le buffle d’eau car il y en a en pâturage qui entretiennent le marais pour les grues.
J'anime aussi des ateliers de cinéma animalier avec des enfants de CM2. C’est organisé par l’école de Ménigoute, l’association Mainate et le Centre Socioculturel du Pays Ménigoutais en fonction de mes disponibilités et sur la base du volontariat des enfants. Il y a entre 10 et 15 ateliers par an et à chaque fois je les emmène dans la nature : observation des traces et indices de la faune sauvage, construction d’affûts et camouflage pour observer les animaux, découverte au microscope de la micro et macro faune et flore, enregistrement des sons de la nature… Toutes les étapes de la confection d’un documentaire animalier pour à la fin avoir un petit film !
MARTIN PÊCHEUR © LÉA COLLOBER
L’important pour moi, c’est de comprendre en s’amusant, les enfants aiment tellement être dehors. Chaque année il y a un enfant qui n’arrive pas à rester attentif en classe, mais quand il est à l’extérieur c’est tout autre chose. J’ai un élève qui n’est pas à l’aise à l’école, mais je crois que c’est loin d’être un cancre et, à mon avis, il a déjà trouvé son truc. À la maison il n’a pas d’écran et passe son temps à potasser des livres naturalistes. Il est super fort, il connaît déjà tout et peut parler de tardigrades pendant des heures, c’est vraiment sa passion. Il n’y a pas systématiquement un intérêt pour les insectes, mais tout le monde aime être dehors et expérimenter la nature ! Je remarque que la première chose que j’apprends aux élèves, c’est à ne pas avoir peur d’elle, peur des hautes herbes, des serpents, des araignées, des abeilles, des lézards… J’ai envie d'aider les enfants à surmonter ces craintes transmises vis-à-vis de la nature, et à développer une certaine empathie surtout. Il y a une curiosité naturelle et j’essaie de la cultiver. À côté, l’enseignement de l'audiovisuel est simple et tellement inné chez cette génération.
Quand j'étais petite, j’ai eu la chance qu'on m'ait montré tout ça justement, j’en ai conscience. Mon papa était naturaliste et m'a vraiment accompagnée dans cet émerveillement pour la nature. J’ai passé beaucoup de week-end en sorties avec Deux-Sèvres Nature Environnement ou le Groupe Ornithologique des Deux-Sèvres. Je trouve que c’est logique que je le fasse pour d’autres maintenant. Enfin, on a la chance d'être sur cette planète avec tout ce qui nous entoure, c'est quand même fou... On a cette capacité humaine à pouvoir regarder et à comprendre, c’est incroyable !
DAPHNIES © LÉA COLLOBER
Je ne me suis jamais dit que ma passion pour la nature pouvait être un métier, ça me paraissait compliqué. À l’école, on me disait que “je n’étais pas une scientifique”, enfin, “que je n’étais pas bonne en maths donc que je n’étais pas une scientifique” alors que je ne pourrai pas étudier la biologie. Pour moi, mes idées et mes rêves ont tout de suite été avortés parce qu’on m’a dit que je n’y arriverai pas. J’ai fait des études littéraires, en lettres étrangères appliquées, en me disant que je garderai la nature comme une passion. Quand je suis arrivée à la fac à Angers, je me suis acheté un petit boitier et je me suis prise de passion pour les araignées sauteuses qui vivaient sur ma terrasse. Ça m’a fait retomber dans le naturalisme d’un coup. J’ai appris sur internet et je me suis mise à filmer. Et puis à une soirée, j’ai rencontré une ancienne et un ancien de l’IFFCAM, Rachel Guénon et Léo Doboka-Sauvage, qui m’ont encouragée à postuler et ça a marché. Je voudrais montrer aux enfants qu’il existe d’autres voies. Petite, je me suis sentie un peu seule dans ma passion pour la nature, à part un ami avec qui j’élevais des phasmes, je ne pouvais pas beaucoup la partager car je sentais qu’on ne me comprenait pas trop. C’est pourtant un métier, ce sont même plein de métiers différents.
Les réseaux sociaux sont pour moi un outil pédagogique avant tout pour servir une cause, sensibiliser, et partager des connaissances qu’on ne trouverait parfois qu’en lisant de longs rapports. Ça me donne aussi la possibilité de soutenir des associations et des sujets qui me tiennent à cœur en les mettant en avant. Il y a une force collective qui peut aller dans le bon sens, avec des cyberactions comme les pétitions par exemple.
LARVE DE DYTIQUE © LÉA COLLOBER
On se dit qu’on n’est pas la seule personne à avoir ces convictions-là. Je vois énormément de contenus émerger et de nouvelles chaînes engagées donc ça apporte de l’énergie. Moi-même j’ai rencontré des personnes grâce à internet, je ne pourrai pas citer tout le monde, mais il y a par exemple Sandra Bérénice Michel, d’Atmosphère Sauvage, ou encore Thomas Jean, de La Minute Sauvage, qui font du super contenu. En terme professionnel aussi, c’est une belle vitrine et ça permet de nouer des liens et de créer des projets communs.
Pour autant, je ne passe pas toutes mes journées derrière les écrans parce que ça peut être redondant et pesant, c’est bien aussi de pouvoir couper. Globalement je trouve que les gens sont bienveillants, pas avec tout le monde et surtout pas avec toutes les femmes, mais moi en tout cas je ressens une volonté de partage. On m’a surtout embêtée au début, quand tu es une femme, jeune, qui débute, il y a souvent d’anciens photographes qui viennent te donner des leçons ou s’étonner que ce soit toi qui présente cette exposition et pas l’homme à côté. C’est vraiment avec le temps qu’on m’a accordé une crédibilité, en voyant mes connaissances scientifiques, sinon il y a une tendance à critiquer la sensibilité malheureusement.
L’EXPÉRIENCE AU FESTIVAL DE MÉNIGOUTE
Le Festival de Ménigoute pour moi c’est une famille ! C’est toujours chaleureux, on retrouve toujours des gens qu’on n’a pas vus depuis longtemps et ça rapproche plein de mondes différents : associations naturalistes, artisans locaux, cinéastes, photographes et artistes animaliers… C’est vraiment un rendez-vous important dans l’année, je peux avoir n’importe quel tournage, j’irai au FIFO !
J’avais cinq ans la première fois que je suis venue au Festival avec mon père. Mon premier souvenir là-bas, je crois que c’est de plier des flyers sur le stand de Deux-Sèvres Nature Environnement et de découvrir comment construire des nichoirs à chauves-souris ! Ensuite je me souviens d’être allée ramasser les salamandres pour ne pas qu'elles se fassent écraser sur la route.
Cette année, c’est moi qui animerai un atelier au Festival, je propose une initiation à la vidéo naturaliste pour les ados. On dit que les jeunes sont toujours sur leur écran… Je vais leur montrer ce qu’on peut créer justement avec cet outil ! L’idée est de réaliser une petite vidéo nature à destination des réseaux sociaux. Moi aussi j’ai commencé comme ça, avec ce que j’avais sous la main, mon téléphone et des petits accessoires qui se clipsent sur l’objectif.
VOLVOX © LÉA COLLOBER
L'anecdote vécue au Festival de Ménigoute
Quand j'étais encore une enfant, Paul Watson, le président de l’association de protection des mers et océans Sea Shepherd, venait faire une conférence au FIFO et on était arrivé trop tard. Il y avait une file d’attente qui allait jusque dans la rue et on n'a pas pu le voir tellement il y avait de monde !
La rencontre faite au Festival de Ménigoute
Il y a beaucoup de rencontres… Pour le côté sciences, je dirais le botaniste Francis Hallé ! Je ne lui ai pas parlé longtemps, mais je l’ai croisé quand il est venu au Festival de Ménigoute en 2021 avec l’association pour la Forêt Primaire qu’il a fondée. C'est quand même un grand monsieur et il a énormément fait, ça m’a fait plaisir de le rencontrer.
L'œuvre découverte au Festival de Ménigoute
L’exposition de Vincent Munier sur son expédition en arctique avec d’incroyables photos de loups arctiques. C'était en 2017, il était l’invité d’honneur du Festival de Ménigoute. Ça m’a marquée et c’était l’année qui précédait mon entrée à l’IFFCAM.
POUR ALLER PLUS LOIN
La recommandation
Les films de Laurent Ballesta, il faut les voir ! Dans ma chambre d’enfance, il y avait deux posters : Shakira et Laurent Ballesta ! Je suis fan de son travail, ça mêle tout ce que j’aime avec l’exploration, la science, le cinéma et la photographie animalière. Ce sont de beaux films avec des images qui émerveillent et ça marche très bien sur moi ! Ça m’a donné envie de m’intéresser à la biodiversité marine. Je me suis mise à regarder dans les mares marines de l’estran et on n’a pas forcément besoin de plonger à 100 m pour voir quelque chose de fascinant !
L’actualité
BANDE-ANNONCE DU FILM ODYSSÉE MARE © LÉA COLLOBER
J’ai réalisé un nouveau film, produit par La Salamandre : Odyssée Mare. En Gâtine, on a perdu la moitié de nos mares en cinquante ans, mais il en reste encore. Je veux essayer de changer un peu la vision qu'on a des mares comme des trous d'eau en putréfaction avec de l'eau stagnante et des moustiques... Je souhaite montrer la vie de l’eau, des plantes qui oxygènent et de tout ce que cet environnement crée. Ces milieux sont très riches, quand on regarde de près, c’est tout un monde à explorer. Comme avec un télescope, le microscope permet de découvrir un univers, on a l’impression d’être dans l’espace en fait. C’est un monde dans un monde. L’aventure, la découverte, elle est partout autour de nous, en permanence. Ça redonne de l’espoir, quand on regarde dans une goutte d’eau, on voit comme ça grouille de vie et qu’elle continue de s’accrocher.
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