Infolettre du Festival International du Film Ornithologique de M�nigoute

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Édito - Luxuriance

L'homme que l'on voit, tout petit, perché en haut d'un moabi, est un homme heureux.  "Extrêmement heureux" de voir sortir sur grand écran le film dont il rêvait depuis longtemps. Diffusées en ouverture de la soirée de palmarès au dernier Festival de Ménigoute, les premières images du nouveau film de Luc Jacquet ont plongé les spectateurs dans un océan de vert. Et le petit homme en bleu posé sur la canopée n'est autre que Francis Hallé, botaniste émérite à l'origine d'un long métrage ambitieux dont il est aussi le narrateur et l'illustrateur (voir sujet ci-dessous : Francis Hallé, l'écorce d'un héros).
Pour matérialiser la croissance d'une forêt primaire sur 700 ans, il a en effet fallu user de subterfuges et d'effets spéciaux…
" Il faut voir ce film sur grand écran, sous peine de manquer sa véritable dimension !, estime le journaliste naturaliste Marc Giraud, qui a eu la chance d'assister à l'avant-première. La première et la dernière scène, filmées par un drone, sont à couper le souffle, et méritent à elles seules le déplacement."
Pour renforcer la mobilisation autour de cette noble cause qu'est la sauvegarde des forêts tropicales primaires, le cinéaste Luc Jacquet (voir son interview) a multiplié les regards et les points de vue via son association Wild-Touch.  Exposition, web-feuilleton, éducation à l'environnement… aucun média n'a été négligé. Jusqu'à la chanteuse qui interprète la chanson du film : Emily Loizeau !
Multiplier les canaux de sensibilisation, toucher tous les publics, c'est aussi, plus que jamais, la démarche du Festival de Ménigoute, dont la 29e édition a connu de nombreux moments forts, aussi bien en salle de conférence avec Michel Rocard, que sur le plateau de Mainate TV  avec les documentaristes ou Ségolène Royal, sur le terrain avec l'écrivain Pascal Dessaint, ou lors de la cérémonie de clôture avec le grand réalisateur Jacques Malaterre…

Luxuriance végétale, fourmillement humain, ramures médiatiques, ce grand film patrimonial et ce beau festival ont surtout en commun une belle idée : le partage.

 

Catherine Levesque



Actualit�s

Le moabi, un immense acteur

Il est des acteurs retors ! C'était le cas du moabi, personnage central du film "Il était une forêt". Lors du tournage, Francis Hallé a découvert qu'il s'agissait d'un arbre unitaire, comme l'araucaria ou le palmier, et non coloniaire. Autrement dit, "un arbre qui ne réitère jamais son architecture".


3 questions à…Luc Jacquet, réalisateur du film Il était une forêt
"J'avais envie d'amener le génie végétal dans une salle de cinéma"

• Entre l'idée de départ de Francis Hallé et le visionnage de l'avant-première, quel regard portez-vous sur votre film avec un peu de recul ?
C'était une aventure un peu folle mais, curieusement, un film ressemble toujours aux premiers mots qu'on a prononcés à son sujet. J'ai été troublé en relisant les premiers écrits : tout est dedans ! J'avais envie que les spectateurs passent du temps dans les arbres, envie d'amener le génie végétal dans une salle de cinéma. Ce film est parti de l'émotion que j'ai ressentie en visant la forêt de Guyane avec Francis Hallé et j'ai eu envie de la partager. J'ai le sentiment d'avoir été extrêmement privilégié en m'immergeant dans ces forêts devenues rares.

• A quelles difficultés scénaristiques et techniques avez-vous été confronté ?
En premier lieu, au fait que le sujet n'était absolument pas cinématographique en soi ! Les végétaux bougent, ils sont prodigieusement et magnifiquement mobiles, mais pas du tout à notre échelle de temps. L'un des défis à relever était de pouvoir passer de l’infiniment court à l’infiniment long sur des gammes spatiales allant de l’extrêmement petit à l’extrêmement grand. Il fallait aussi aller très loin dans des mondes relativement inaccessibles. Mais nous avions particulièrement soigné les repérages. On peut même dire que notre deuxième voyage a été un "crash test" durant lequel on a détecté les problèmes. Comment entrer dans le point de vue des arbres et créer de l’empathie pour ces géants ? Chaque plan était un défi et aucun matériel n'était suffisant. Nous avons donc développé des prototypes comme l’Arbracam, un système de caméra sur cordes capable de faire des travellings à la dimension de ces forêts, ou un drone conçu pour travailler sur toute la partie supérieure des arbres. Nous avons aussi eu recours à des systèmes optiques très particuliers, comme le périscope.

• Pour votre prochain projet, renouvellerez-vous la démarche "cross media" qui donne une dimension innovante au film ?
A travers mon association Wild-Touch, j'ai souhaité amplifier le message en développant une logique de "méta-récit", c'est-à-dire en déclinant simultanément le sujet à travers de nombreux médias (webfeuilleton, participation d’artistes, vidéos pédagogiques…) pour augmenter la portée du plaidoyer. Mon prochain sujet s'y prêtera tout autant puisqu'il portera sur Claude Lorius, un éminent glaciologue qui a permis de découvrir le changement climatique. On y trouvera le souffle des premières expéditions polaires et le génie des scientifiques qui ont effectué les premiers carottages dans l'Antarctique. Mais cette nouvelle aventure nous entraînera bien au-delà du continent blanc…

Propos recueillis par Catherine Levesque.
Francis Hallé, l'écorce d'un héros

Un homme de 75 ans à 70 m de hauteur, ça n'existe pas aurait pu écrire Robert Desnos. Ce serait mal connaître le vaillant botaniste, qui confie avoir plus de mal à redescendre de la canopée… qu'à y monter ! Rendu célèbre par ses expéditions sur le "Radeau des cimes", Francis Hallé n'a pas eu de mal à convaincre le réalisateur Luc Jacquet de passer de la blancheur de l'Antarctique à la verte forêt pluviale. "J'aimerais que mes contemporains y aient accès et voient à quel point c'est beau là-haut !, nous confie l'homme sylvestre. Je souhaite que ce film entraîne la même prise de conscience pour les forêts tropicales que Le Monde du silence de Cousteau avec les fonds marins. Il y a 25 ans, le message aurait certes été plus facile à faire passer, mais je suis comme un médecin devant un malade : tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir."
Le parti pris d'Il était un forêt : ne pas montrer la déforestation mais se contenter de la suggérer. "Nous étions d'accord sur cette approche, poursuit Francis Hallé. La déforestation a souvent été filmée. Je préférais de loin rompre avec l'image de l'enfer vert véhiculée par les médias en montrant que la forêt primaire est bien au contraire calme et hospitalière."
Les forêts filmées au Pérou, dans le parc de Manù, et au Gabon, n'en restent pas moins de vieilles forêts secondaires, les forêts primaires, devenues rarissimes, étant trop difficiles d'accès pour des tournages d'une telle envergure. Or, il faut sept siècles pour qu'une forêt secondaire retrouve son état primaire, d'où l'idée du scénario…

Précurseurs de l'"architecture des plantes", le biologiste a fait de nouvelles découvertes durant le tournage. "Rien d'étonnant, estime-t-il, dans un milieu d'une telle richesse", où ont été déployés périscopes, endoscopes, drônes et autres "arbracams". Un arsenal de technologies et de savoirs penché sur un univers subtil, fragile et méconnu.

 

Catherine Levesque

Brèves

Surfer sur la canopée

Comme aux temps des grandes expéditions naturalistes, Luc Jacquet a emmené sur le tournage des scientifiques et des artistes pour témoigner de la beauté de ces derniers grands sanctuaires de biodiversité. Parallèlement au film, les internautes peuvent à leur tour surfer sur la canopée et apprendre à en déceler les codes. Emaillée de quiz, l'exploration se fait en différentes étapes : on partage les émotions des protagonistes survolant la canopée ou évoluant dans la "forêt du bas", on suit les étapes du tournage sur un "roadmap" et l'on partage les expériences des artistes sollicités par la production, comme Vincent Munier, ou des techniciens, comme Yvan, cordiste grimpeur. Une passionnante "web immersion" du camp de base jusqu'au sommet d'arbres vertigineux.
> www.iletaituneforet-expedition.org

Sous l'arbre de Noël…

La sortie d'Il était une forêt s'accompagne de la publication de cinq ouvrages chez Actes Sud et d'un jeu. L'ouvrage officiel (35 €) complète utilement le film, dont il révèle l'aventure humaine et technique. Il a son équivalent pour les 8-12 ans (14 €), qui développe les "personnages phares" : le figuier étrangleur, le cecropia et ses fourmis, l'éléphant coursier… Pour les 2-5 ans, un imagier (6,50 €) initie au vocabulaire de la forêt tropicale, tandis que les 5-8 ans revivront l'épopée du film à travers un album (4,95 €) richement illustré. Frédérik Mansot, illustrateur en résidence pendant le tournage, nous offre quant à lui un bel album (14,80 €) sur L'homme qui dessinait les arbres, à partir de 7 ans.
Enfin, un jeu de cartes "made in France" a été éco-conçu par un jeune Corrézien, qui invite à faire pousser une forêt en respectant les interactions entre espèces végétales et animales. Bonne pioche !

Livres & DVD

Les coups de coeur de FIFO-Distribution :

Alpes Chroniques sauvages - Vincent CHABLOZ
Ô papillons - Marie DANIEL et Fabien MAZZOCCO
Maintenant le mal est fait - Pascal DESSAINT
L'oiseau papillon: tichodrome - Frank NEVEU
À vol d'oiseau - John DOWNER
Les oiseaux ont-ils du flair? Luc et Muriel CHAZEL
L'aile d'un papillon... - Nick De PENCIER


Disponibles chez
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